Dies Contemptio (24)

Résumé :

Eyma a soixante jours pour prouver que la sorcière rouge, qui massacre leur famille en représailles du massacre traditionnel des maudites, a tort et qu'ils ne méritent pas la mort. Elle est retournée à la capitale du royaume, là où la sorcière rouge a grandi, dans l'espoir de trouver la ou les personnes qui l'aurai(ent) aidée.



Sa cousine enferma tout simplement Eyma dans l'une de leurs chambre d'amis. Bien sûr, elle n'aurait pu rêver mieux comme prison, c'était une chambre de princesse, mais Eyma n'était pas la pour admirer le mobilier. Au contraire, cette pièce lui rappela de mauvais souvenirs.
Quand son père était en vie et qu'ils venaient au château du roi en visite, une atmosphère étrange et malsaine régnait toujours dans ces lieux. Si à cette époque Eyma ne parlait pas à ses cousines, c'était précisément à cause de ce malaise constant ; elle évitait autant de gens que possible, jouait les timides et faisait tout ce qui était en son pouvoir pour rentrer le plus vite possible chez elle. Beaucoup interprétait cette attitude comme celle d'une campagnarde impressionnée par le faste de la capitale. Son père seul savait de quoi il retournait. Un jour, il lui avait fait remarquer qu'elle n'était pas tenue de venir et qu'il pouvait facilement trouver une excuse afin qu'elle reste a la maison.
« Je ne veux pas que tu y ailles tout seul, papa » avait-elle répondu d'un ton ferme. Elle savait que le roi, comme tous les autres rois avant lui, cachaient l'existence d'une de ses filles et Eyma avait toujours eu peur, même en grandissant, que le roi ne lui ravisse son père. Elle ne voulait pas se retrouver seule. À cette époque, la solitude la plongeait dans une profonde angoisse et sa famille veillait toujours à ce qu'au moins l'un d'entre eux soit toujours à ses côtés. Elle n'était jamais seule dans le domaine de son père.
Aujourd'hui, elle était chez le roi. Son père était mort, tué par sa fille anathème. Une larme de colère roula sur sa joue.
Jusqu'à présent, elle avait renfermé ces souvenirs douloureux loin, très loin, dans une boîte, au fond de son cœur... Toutefois, se retrouver de nouveau plongée au milieu de ce luxe pour elle légitimé, s'entendre dire qu'une femme de chambre lui sera attribuée, que de nouveau elle allait penser a sa tenue, à ses cheveux, ce genre de matérialités, qu'elle avait laissées de côté... Elle se souvenait de ce qu'elle avait perdu, de la dureté avec laquelle elle l'avait perdu et de sa résolution de trouver vengeance.
Elle restait hagarde au milieu de la pièce. Elle ne voulait s'asseoir ni sur les somptueux fauteuils ni sur le riche divan. Le lit, avec ses magnifiques rideaux en baldaquin, lui rappelait celui qu'elle avait laissé au château de son père. C'était dans ce lit qu'elle avait rencontré, pour la première fois, la sorcière rouge. Elle voyait près de la commode, sur laquelle étaient posés brosses, fioles et autres accessoires de grande dame, la vieille femme qui avait coiffé ses cheveux pendant tant d'années. Souvent, ses frères déposaient un livre sur le bureau massif qui se trouvait près de la fenêtre. Elle-même y entassait les lettres qu'elle échangeait avec de lointaines amies. Son père la grondait souvent de ce désordre dans la chambre de la fille du châtelain...

Quand la femme de chambre arriva pour se présenter à sa nouvelle maîtresse, elle la trouva fiévreuse, absente et tourmentée. Elle était éveillée mais ne répondait pas à ses appels, son front était brûlant et ses yeux semblaient chercher quelque chose sans y parvenir. La jeune femme insista auprès d'Eyma pour qu'elle se couche, ce qu'elle finit obtenir après un certain nombre de refus obstinés. Elle appela aussitôt le médecin du palais qui constata la crise mais fut incapable de la stopper. Il conseilla du repos et surtout, aucune contrariété.
Plusieurs cousines vinrent lui rendre visite sur son lit de douleurs. Eyma oscillait entre raison et folie. De puissantes sueurs froides l'empêchaient de situer la réalité. La douleur et la tristesse, après son cœur, affectaient son esprit.
« Laisse-toi aller. De toute façon, ça ne durera pas longtemps. Le dragon veille... »
Elle ferma les yeux et se laissa tomber. Dans l'obscurité de sa propre conscience, une voix raisonna :
- Voilà un thé bien servi.

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